Réflexions

10 choses que j’ai apprises sur moi en 2020

Le bilan. C’est un peu l’exercice traditionnel de fin d’année. Sans surprise, 2020 c’est un peu le chaos. Situation personnelle, professionnelle, sanitaire. Mais de toutes situations, on apprend. Un petit article sans filtre pour commencer 2021.

J’ai besoin d’évoluer dans un groupe

Je suis freelance mais j’ai toujours été entourée. Je ne suis pas de celleux qui kiffent être seul.e.s derrière leur ordi. Clairement pas. J’ai besoin d’interactions sociales. Cela fait partie de moi. Une formation — je suis en reconversion professionnelle — au mois de juillet me l’a renvoyé en pleine face. Cela faisait plus d’un an et demi que je ne m’étais pas retrouvée dans un groupe de gens. 16 mois que je n’avais pas été autre chose que le rocher de mon petit garçon, tentant de survivre à la vie. Spoiler, je suis autre chose ! Après cette formation, une autre expérience, radicalement différente, en immersion dans la nature, est venue appuyer aussi sur ce point. Comme si j’avais besoin que ça vienne de l’extérieur. Coup sur coup, je me suis retrouvée dans 2 groupes de gens, nouveaux, qui m’ont acceptée comme j’étais et pour ça je suis très reconnaissante. Je sais que ce n’est pas “que” de la chance, mais j’estime être chanceuse quand même.

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Photo : Etika Mondo

J’ai besoin d’être loin de l’ordinateur.

Chaque année, je déconnecte. Au moins une fois par an. Je ferme l’ordi l’été pour 1 mois en sachant que ce n’est pas assez mais que c’est ce que je peux m’accorder et c’est déjà pas mal. Depuis un an — et le confinement a clairement amplifié aussi cela — c’est devenu viscéral. Probablement le combo perte de sens, perte de repères et burn out. En tous cas, allumer mon ordi chaque jour était devenu un supplice. Tous les moyens ont été bons pour procrastiner, faire autre chose, “perdre” du temps. J’étais à bout de souffle. Si cela va un peu mieux aujourd’hui, c’est parce que je ne suis plus beaucoup devant. Je me suis sentie revivre tout ce temps que j’ai passé en boutique ou en atelier. Pas d’ordi dans le sac, téléphone loin de moi. Avec une pointe de culpabilité parfois pour ce qui était en attente mais je sais que je ne pouvais pas faire autrement.

Photo personnelle

Ecrire régulièrement me manque mais est trop énergivore pour le moment

J’ai quinze mille sujets en tête. Des sujets sur la violence, la liberté, l’éducation, la maternité, les savoirs-faire, la société patriarcale, les jeux vidéos etc. Manque de temps, syndrome de l’imposteur, manque d’énergie bref, je commence et je ne finis pas. Je ne compte plus le nombre de brouillons ici ou sur papier. Je ne sais pas trop où publier aussi alors je vais commencer par le début. Je refais mon site (avec de l’aide ❤) . Pour qu’il corresponde plus à la moi d’aujourd’hui, bouleversée, traumatisée mais qui est encore debout, qui va de l’avant. J’ai 2 séries de textes à venir, une courte qui démarre par ce bilan et sera complétée par 2 autres textes sur 2020 et une plus longue, de beaux portraits que je dois mettre en forme. J’ai hâte. Mais c’est dur.

Je déteste la vie qu’on m’a imposée

J’aime pouvoir choisir, j’aime discuter, j’aime parfois défendre mon point de vue. Par dessus tout, j’aime pouvoir anticiper. Je ne sais pas si c’est la vie et ce vieux Guillain-Barré qui ont accentué ce trait chez moi, si c’est le fait d’être à mon compte depuis toujours, ou encore de venir d’une famille modeste, mais j’ai besoin d’anticiper, de prévoir. Parce que j’ai des rêves et que je ne veux pas y renoncer. C’est déjà très dur de faire le deuil de la famille que je n’aurai jamais. La trahison de 2019, pour le moment, elle ne passe pas. Parce que c’est la décision d’un tyran, d’un dictateur, qui a des conséquences terribles sur ma vie, au quotidien et au futur. C’est simple, depuis ce mois de mars 2019, je survis. Tant financièrement, que psychologiquement, que physiquement. Et je déteste ça. Parce que ce n’est pas moi. Parce que je n’aurais pas du en être là. Je n’ai pas eu mon mot à dire. J’ai dû tout encaisser en pleine face. J’encaisse encore… Il paraît qu’il y a une courbe. Une partie de moi n’a toujours pas réalisé le séisme que je viens de vivre.

Photo personnelle

J’ai toujours des projets et des rêves. Je ne sais juste plus comment les réaliser

Mes différentes expériences post confinement saison 1 me l’ont bien rappelé. J’ai des projets. Même si la boussole ne trouve pas le Nord en ce moment, ils sont là. Mais trop de questions, trop de contraintes, trop de barrières, ça ne leur laisse pas beaucoup de place pour s’exprimer. Exit le projet de tiers lieu dont je parlais fin 2018. Bonjour la reconversion dans les fleurs que j’imaginais pour plus tard. Fleuriste, c’est une étape. Une belle étape. Une de celles qui me réjouit. C’est notamment celle qui permet de sortir de la spirale. Je rêve d’autre chose, d’ailleurs au pluriel.

J’ai besoin de sincérité

Le travail que j’essaye de faire sur les émotions avec mon fils a exacerbé ce sentiment déjà si présent en moi. J’ai besoin de vrai, d’authentique, de sincère. De personnes qui savent exprimer leurs émotions et leurs besoins. Je ferai mon possible pour transmettre ces capacités là à mon fils. Et ça se traduit au niveau pro. Le technowashing ne m’enthousiasme plus du tout. Le startupwahing et le designwashing non plus. Cela me pose un problème plus éthique sur le fait que “le monde” y va quand même. Mais le jour où j’ai réalisé que je ne mettrai ni les pieds sur Tik Tok, ni les pieds sur twitch, que je songeais à fermer mon compte twitter, je savais que j’étais devenue une “vieille de la comm». Ou plutôt que, ce que la communication devenait ne m’intéressait plus du tout. Trop de bruit de fond. Trop de gens, sûrs d’eux, trop d’entre soi, trop de fake. Et en terme de fake, j’ai été confrontée à un beau spécimen. Celui qu’on acclame dans ses valeurs et des engagements sans savoir qu’il a abandonné son bébé à la naissance, ça me tue. Je n’en peux plus de ce monde là. J’aime raconter de vraies histoires.

Hypersensible assumée

Je sais ce que je suis. Ce n’est pas prétentieux. Je le savais déjà, mais les événements de ces deux dernières années me l’ont rappelés. Je suis une «battante». Je suis revenue de la paralysie totale, j’ai ré-appris à marcher, à porter une fourchette à ma bouche. J’ai accouché seule et j’élève un petit garçon seule depuis sa naissance. Ce n’est pas parce que je pleure pour un rien qu’on ne peut rien me dire. Pleurer c’est laisser son corps exprimer une émotion, la laisser partir. En aucun cas cela doit constituer un reproche ou pire, une excuse pour ne rien dire. Être hypersensible c’est voir le monde, les autres et l’environnement d’une autre manière, c’est le vivre en conscience. Et parfois ça fait mal. Mais c’est riche et c’est vrai.

Je n’arrive pas à gérer plusieurs combats à la fois

Je ne m’y attendais pas. J’ai toujours eu l’habitude de faire plusieurs choses en même temps, plusieurs projets en parallèle. Cette année m’aura montré que je ne peux plus faire ça. L’injustice sociale que j’ai ressentie terriblement pendant le confinement via les injonctions à «prendre du temps pour soi», l’injustice historique via le conflit meurtrier en Artsakh dont personne n’a parlé – ni les médias, ni les politique-, le combat des indépendants pour se faire entendre et survivre malgré la crise sanitaire, le drame écologique qui continue de se jouer sans que les décideurs et autres acteurs de poids n’osent prendre les décisions qui pourraient changer quelque chose (par exemple ce qui se passe avec la convention citoyenne pour le climat)… voici quelques exemples de ce sur quoi j’aurais pu prendre la parole, m’engager, réfléchir, agir. Je me suis juste indignée. Le quotidien est déjà si difficile que je ne peux pas faire plus. Pour ne pas que ma colère, ma fatigue, mon indignation ou ma résignation ne rejaillissent sur mon bébé. Pour le préserver. J’ai choisi de me concentrer sur nous. Le confinement saison 1 m’aura laissée exsangue, venant ainsi par dessus cette si difficile année 2019. Ce n’est qu’au confinement saison 2, que j’ai pu récupérer un peu de forces.

La maternité a pris une grande place dans ma vie

De fait – et à mon grand dam- la maternité me définit maintenant. Je suis maman. Solo. Je ne peux ni n’ai l’envie de le cacher. Si 2019 a été une lutte permanente pour survivre au post partum, 2020 m’a montré la maternité sous un autre jour. Au niveau professionnel, cela définit mes horaires de travail, mes choix de travail, mes départs en catastrophe pour aller chez le médecin, mes sorties, mes lectures, écriture, mes sujets, mon futur. Alors au-delà de ces contraintes, je souhaiterais reconnecter cette partie de moi avec des parties plus anciennes. La musique, l’accompagnement, le yoga… Comment ? J’ai des idées mais pour le moment, c’est “compliqué”. En tous cas, c’est un axe de ma nouvelle identité, même professionnelle. Puisque c’est la partie la plus importante de ma vie en ce moment, autant que j’essaie d’en faire quelque chose.

Photo : Amandine Gimenez Photographie

Je suis toujours debout

Droite. Cassée, mais droite. Survivante. Déterminée. Quiconque voit mon petit garçon sait. Je n’ai pas à me justifier. J’en chie. Pardon pour l’expression hein. Mais le prix à payer pour qu’il aille très bien est lourd. Parce que je veux lui offrir le meilleur. Parce que je veux pouvoir lui dire, en le regardant dans les yeux, voilà ce qu’on a traversé mais voilà ce que je t’ai donné. Alors je ne veux plus me taire non plus, parce que le silence fait gagner les dictateurs, le silence permet l’oubli, le silence permet que l’histoire change. Je le sais bien, je suis arménienne.

crédit photo: Amandine Gimenez Photograhie

Je ne sais pas où je serai en décembre 2021 mais j’espère que j’aurai retrouvé au moins la direction d’un nouvel alignement. Je me le souhaite ainsi qu’un peu de répit…