Maternité

Le reflet du courage à l’aune de la réalité

On dit parfois que j’ai du courage, que je suis forte, que je suis une super maman. Je me vois chaque soir et je sais que ce n’est pas vrai. Je ne suis rien de tout ça.

Je suis juste une fille larguée sans vraiment le dire, comme une vieille chaussette juste avant d’accoucher. Pour qui pour quoi ? Pas trop compliqué à deviner.

Je suis cette fille qui ne voulait pas d’enfant et qui petit à petit est venue à se dire que ça serait chouette d’accueillir un petit chouchou chez nous, dans notre bonheur.

Je suis cette fille qui s’était un peu projetée pendant la grossesse de ce que pourrait être cette vie à 3, ce bonheur que je pouvais (a)percevoir alors qu’il était encore au creux de mon ventre.

Je suis cette fille qui n’a rien compris, sonnée, quand il a dit qu’il déciderait de ce qu’il ferait à la naissance du bébé.

Je suis cette fille, détruite et gommée qui a dû accepter d’avoir un spectateur et non un acteur lors de son accouchement.

Je suis cette fille qui a assisté sans rien pouvoir dire ou faire à la mise en œuvre de ce plan de destruction.

Je suis cette fille encore qui a cru jusqu’au bout en plein post-partum que quelque chose pouvait s’inverser quelque part. Il y avait tant de chemins possibles.

Je suis cette fille qui pleure encore bêtement cette famille qu’elle n’aura jamais, cette fille qui a vu ses rêves, ses envies, ses projets reportés sine die.

Je suis cette femme aussi, abandonnée alors que son corps déformé, n’était plus vraiment le sien. Cette femme à qui il disait au noël 2018 qu’il serait toujours là et qu’il a déchiquetée si facilement en mars 2019.

Je suis aussi cette fille, si fragile qui pleure tous les jours, de fatigue, de solitude, d’incompréhension, de culpabilité…

Je suis cette fille qui n’avait pas peur de dire les choses et qui s’est retrouvée devant un tissu de mensonges.

Je n’ai pas vraiment de courage, je me sens comme une automate. Une automate vivante et attentive avec mon bébé mais qu’on aurait oublié de remonter pour tous les autres aspects.

On ne s’est pas séparé. Il est parti. Violemment. Une partie de moi a pris les commandes, pour Azad, parce qu’il fallait survivre et l’accueillir. L’autre partie est morte ce jour là. Abattue de sang-froid.