Maternité

Quelque chose d’unique — Lettre à mon bébé #2

Il y a un an, je m’apprêtais à vivre quelque chose d’unique. Je partais à ta rencontre.

Ce 23 avril 2019, je ne le savais pas encore mais mon corps se préparait. J’avais prévu une journée tranquille et je me rappelle encore des moindres détails. Je me souviens que j’avais rendez-vous avec une très bonne amie dans notre tout petit salon de thé habituel. Ce jour là, j’ai mis plus de temps. Mon ventre pesait si lourd ! Quand on est arrivé, il n’y avait plus de place alors on est allée ailleurs à pied, au Pain Quotidien. Puis toujours à pied, retour aux Halles où j’ai eu la joie de parler au téléphone avec mon frère qui habite si loin en ce moment.

Je me sens assez calme. Etrangement, dans le tsunami que je traverse, je sais que j’arrive à faire le vide pour ne penser qu’à toi. Ta sécurité, ton arrivée dans ce monde, notre rencontre. Mon corps te connait déjà. Mon coeur t’aime déjà au delà de tout et ma tête te protège. Ce soir, je suis calme à la maison. Ma valise est prête, mon ballon est sorti. Il n’est pas là et comme d’habitude en ce moment, ne rentrera pas pour manger avec moi. Vers 20h, d’un coup j’ai mal au ventre. Je ne m’inquiète pas trop mais moi qui n’ai pas eu beaucoup de contractions avant (à part un épisode une dizaine de jours avant où j’ai cru devoir aller à la maternité) j’ai l’impression que ce sont les vraies contractions qui arrivent. Je me rappelle aussi que je demande à mes copines si je peux manger si jamais c’est bien le début du travail et devant leurs grands OUI, je me fais un plat de pâtes. Les contractions ne s’arrêtent pas alors je lui envoie un message pour lui dire que ça sera sans doute pour bientôt.

Du coup il rentre et le stress monte pour moi. Depuis ses escapades et coups de fil nocturnes, je n’ai plus grand chose à lui dire. Au fond de moi, je sais qu’il est là pour les mauvaises raisons mais je n’ai pas trop le choix. Ma poche des eaux se fissure et je ne sais plus trop ce que je dois faire. Attendre encore ? Rester à la maison le plus longtemps possible comme j’avais prévu au départ ? En tous cas, les contractions me font bien mal déjà. A 23h, on part pour la maternité en taxi. Le gars n’aura visiblement rien remarqué puisqu’il nous dépose à l’angle de l’hôpital en nous souhaitant une bonne soirée. J’aurais tant aimé qu’il me prenne la main, qu’il m’enveloppe de ses bras, sentir sa chaleur ou son amour mais comme il n’y a rien de tout ça, je dois me faire violence pour ne penser qu’à accompagner les contractions.

Il y a un an, à cette heure là je souffrais terriblement, seule avec un spectateur. Je crois que je m’en voudrais toujours d’avoir accepté qu’il soit là. Mais l’unique c’est que j’allais enfin pouvoir te tenir dans mes bras. Je ne me rappelle pas très bien de mon accouchement et je ne vais pas raconter ici ce qui s’est passé, ce n’est pas le but. Je me rappelle avoir eu très mal, avoir eu peur aussi, avoir eu envie de le mettre dehors pour de bon quand il partait “prendre l’air”, je me rappelle aussi avoir pensé à toi très fort, essaye de te visualiser, te laisser faire. Et puis j’ai un gros black out. Je me rappelle simplement avoir pleuré très fort puis t’avoir près de moi pour la toute première tétée. Pleurer très fort parce que je savais que ton papa ne ferait rien pour rester avec nous, pleurer très fort aussi parce que j’avais peur de la suite et de cet inconnu dans lequel on plongeait tous les deux.

Il y a un an, à l’heure du goûter, quelque chose d’unique est arrivé. Je suis devenue ta maman.